Oh, ce que tu t’apprêtes à lire ne va pas t’emmener aussi loin qu’Indiana Jones, aussi vite que Rasta Rockett ni aussi profond que Rocco Siffredi, mais les histoires qui vont suivre sont (presque) entièrement véridiques et elles en ont fait marrer plus d’un. Ooooh oui.

Au fond, au départ de ces récits il ne s’agit de rien de plus que de deux cons qui ont toujours au moins une idée de con pour qu’une situation devienne une nouvelle histoire à la con à raconter mais ça a déjà donné quelques récits pleins d’action (pas toujours intelligente), de suspense (pas toujours insoutenable), de romantisme (parce qu’il n’y a pas que le cul dans la vie, il y a le sexe aussi), de réflexion (pas toujours à jeun) et de prouesses sexuelles (jamais ensemble et parfois seuls) qui ont enjoué bon nombre d’amis venus faire la fête avec eux dans leur coloc’ ou leur soirées.

Alors bien sûr rien ne vaut la place de ces amis, assis sur un canap’ de récup’ déjà à moitié à la jaille, avec une choppe de whisky à la main et dans les oreilles le son des Doors, craché par une stéréo fatiguée qui bloque après une chanson ou deux, quand John-John saisit un marteau pour changer de piste et que John Bigs se lance dans le récit d’une de ces épopées. Puis une autre. Puis une autre, jusqu’à ce que les premières personnes usées par le rire le provoquent au Cap’s. Malgré l’apparence, la routine n’avait que peu de place dans ce repère : elle n’avait que celle qu’on lui donnait, celle qu’on choisissait, celle de se marrer à chaque soirée ! Alors pose-toi dans un vieux canap’, remplis-toi un vase de whisky (ou d’Oasis si t’es une petite fiotte) et profite des aventures… de John & John !

dimanche 2 août 2015

La Bataille de crottes de biques


         Ne vas pas croire que dans leur vie de débauche et de rébellion nos deux compères ne passaient leur temps qu’en soirées michü, petit malotru ! Non ! Ils passaient aussi des vacances michü ! Depuis leur premier voyage en mode sac-à-dos en Grèce (c’est là encore une autre histoire !) et après avoir déjà arpenté près d’une demi-douzaine de pays ensemble (oui, c’est ça, cinq. Ne chipote pas s’il-te-plaît), les récits d’aventures aussi incroyables qu’insolites se sont accumulés à la vitesse d’un cheval au galop. En descente. Dans le Concorde. Vite, quoi. Parmi toutes ces aventures, celle de la Bataille de crotte de bique illustre bien la portée de la débilité que les  John & John s’autorisaient !


         C’était là en plein cœur d’un road-trip au Portugal que les deux compères s’étaient posés pour un peu de repos dans le village inquiétant de Geres (pourquoi était-il inquiétant ? Ceci est une histoire de passages secrets qui font se déplacer les gens tellement vite de magasin en magasin qu’ils donnent l’impression que ce type aux grosses narines bosse derrière chaque porte de la ville ! Ce qui, en plus, était presque vrai !), dans les montagnes paumées au nord-est du pays. Après s’être un peu reposés (la guitare dans une main, le Porto dans l’autre… pas évident pour jouer, pas dérangeant pour boire) dans un camping de manouches sur les hauteurs du village, l’heure était à la découverte des environs. La découverte du bar du coin, pour commencer ; des ruelles alentours ensuite ; puis du petit resto qui leur a vendu un plat de poulet rôti aux légumes fraichement cuisinés, large comme une chemise de Carlos et pour le prix d’une frite ; et enfin d’un petit chemin non balisé qui semblait monter à travers la forêt. Il n’en fallait pas plus aux deux compères pour se demander jusqu’où ils pourraient le suivre (le chemin, pas Carlos) et c’est ainsi qu’ils partirent pimpants, joie au cœur et claquettes aux pieds le long de ce sentier de montagne.


         La voie du sous-bois continuait à serpenter le long de fermes et de vieilles bâtisses de pierres et de bois quand deux énormes chiens (d’après la légende, chacun d’eux était assez gros pour dévorer un poney PLUS un paquet de  Pépito au goûter) se postèrent à la droite d’un embranchement et se mirent à gueuler suffisamment fort pour que les deux Johns se regardent et se disent vaillamment « on va prendre à gauche, hein ? Ça a l’air plus joli… ».


         Et à gauche ils partirent, suant sans cesse sur des pistes en côtes, enjambant des pins que la tempête avait fait s’écrouler, glissant sur des pierres quand la pente était trop raide, escaladant même des rochers pour que l’ascension et la découverte ne s’arrêtent pas. Enfin, après de longs et éreintants efforts s’ouvrit devant eux une immense clairière en crête (mais au Portugal quand même), donnant un point de vue sur les montagnes du massif et les vallées en contrebas. Un appel à la pause, en somme ! (Non, pas le département ! On était au Portugal, face de tête !) Là, la magie opéra d’elle-même puisque c’est après quelques minutes seulement de contemplation que se firent entendre des sons de clochettes et de sabots sur la roche. Des dizaines, des centaines de chèvres de toute taille et de toutes les couleurs (sauf pourpre) vinrent défiler le long du caillou sur lequel étaient assis John et John, qui regardèrent le spectacle sans parler. Sauf pour dire « bonjour » au berger (on n’est pas des bêtes !).


         Près d’une demi-heure s’écoula au rythme du pas des bêtes qui rejoignirent ce qui avait paru être une clairière et qui était en fait un pâturage. Une demi-heure à mater des biquettes. Au sens propre, hein. Alors quand ils décidèrent de redescendre, ils étaient plutôt ressourcés et détendus ! Assez même pour se permettre un détour et repasser par le village pour une ballade qui les mena droit vers un petit atelier d’artisans où une famille travaillait le bois de génération en génération. La légende raconte que c’est l’aura de Saint Régis, patron des Cons (idole de John Bigs, donc), qui les conduisit là-bas… Toujours est-il qu’ils passèrent un moment à rire et à faire de la merde avec tout ce qu’on peut trouver dans ce genre d’endroit : cuillères, casse-tête, masques, jouets, didjeridoo… quand soudain : « HAAAAAALLELUJAH !! » Saint Régis fût bien éclairé d’attirer le regard de John Bigs sur l’objet à l’origine de cette aventure (… qui a dit « une crotte de bique ?.. »).

« Eh, John…
- Mmmh ?
- Tu vois ce que je vois ?
- Oh ouais ! Elle est à moitié bonne !
- Arrête John, elle a 11 ans. Nan, je te parle de ça, regarde.
- Des lance-pierres ?
- T’imagines la bataille de crottes qu’on pourrait se faire là-haut ? »

On peut toujours se fier à John Bigs pour avoir des idées à la con. Et à John John pour garder le bon sens nécessaire à raisonner son acolyte en toute situation :

« Wowowooow… Mais tu t’rends pas compte ? On peut pas remonter là-haut !.. Pas tant qu’on n’a pas de Porto !! »


         Ainsi les Johns partirent s’équiper pour une deuxième ascension : lance-crottes, Porto, pain, saucisson, paquet de gaufrettes, guitares et sacs de couchage… Et ils regrimpèrent la montagne. Et ils en re-chièrent. Et ils en re-rigolèrent. Et ils se re-émerveillèrent du lieu et de la vue du haut de ces pâturages. Le moment qui suivi fût de l’ordre de la seconde, une seconde en l’espace de laquelle les sacs et les guitares se retrouvèrent posés sur les rochers tandis que les compères se dirigeaient à un bout et à l’autre en cherchant le spot le plus chargé en munitions crottes de chèvres. Les tirs commençaient à faire ressembler la clairière à une banlieue de Bagdad quand un père et son fils apparurent sur un côté, visiblement partagés entre la décision de continuer leur randonnée en traversant la crête et celle de rebrousser chemin pour ne pas prendre le risque de se retrouver pris dans un feu fourni de merdes de biquettes. Une trêve fût ainsi négociée, chaque John profitant de la traversée des intrus pour se charger les poches en boules de caca.


         Ce fût là une des seules fois que John John mit une honnête branlée à John Bigs, qui avait tellement de marques rouges après écoulement des stocks de balles qu’il ressemblait à une pub pour Biactole. Un temps considérable s’était écoulé pendant les hostilités (50 ans, selon la légende. 50 ans de diarrhée aérienne en altitude. 50 ans au sommet d’une montagne de connerie) ; un conflit pendant lequel la merde a littéralement volé. Des billes de biques aux Frisbee de vieilles bouses de vaches séchées. Les Johns ne sentaient plus le Tahiti Douche quand la lumière du Soleil vint à décliner, c’était pour nos débilos le signal de cessez-le-feu et de à-l’apéro-en-jouant-de-la-guitare-au-bord-de-la-montagne, le temps bien mérité du premier verre de Porto et de la préparation des sandwichs pain-saucisson pendant que John John jouait « I shall not walk alone » de Ben Harper pour accompagner la fin du jour filmée par John Bigs. Une nuit à la belle étoile permit ensuite aux deux Johns d’admirer les feux de forêts environnants, le lever de Lune et la rapidité des puces portugaises à se loger entre deux poils de couille avant de prendre le chemin du retour, le ventre chargé de deux gaufrettes à la vanille.


« Eh, John ?
- Ouais ?
- On l’a déjà vu le chemin, on se fait un peu chier là, nan ?
- Ouais.
- On se fait la descente en courant ?
- Ouais ! »


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